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POSTFACE
 

L’expression par écrit de mes souvenirs d’ Algérie m’a paru nécessaire, dès la médiatisation du livre du général Aussaresses, en mai 2001.

Officier, j’ai choisi à trois reprises, de servir chez les parachutistes, notamment au 1er Régiment de Chasseurs Parachutistes, à Pau. Quand je le rejoins à la mi-novembre 1966, après plus de deux mois de qualification de chef de section parachutiste à l’Ecole des Troupes Aéroportées, c’est le colonel Aussaresses que je salue comme chef de corps, et il sera mon chef durant deux ans. Parmi les jeunes lieutenants et sous-lieutenants, si ce n'est mon camarade ESOA L, ancien du 27°B.C.A. d'Azazga, je suis le seul à être passé en Algérie ; seuls les plus anciens lieutenants d’active y ont servi un an, directement après Coëtquidan, de 1960 à 1961. Il y a certes quelques anciens, sous contrats ORSA. Mais pour nous, notre chef est un ancien des Services Spéciaux, et nous n’en savons guère plus. Je perçois alors notre colonel comme un chef essentiellement occupé par les relations extérieures au régiment, celui-ci étant réellement commandé par le commandant en second, le lieutenant-colonel Guichard. Le Colonel et son épouse (elle-même titulaire de la Légion d’Honneur pour ses actions personnelles durant la guerre 39-45) sont très appréciés par la totalité du Régiment pour leur dynamisme, leur jovialité. Mais surtout, l’adhésion totale des cadres sera renforcée par les missions confiées au régiment, fin décembre 1967 : le régiment est alors en « Alerte Guépard N°1 (voir note 55), »et le soir de Noël, les cadres des compagnies en alerte à 6, 9 ou 12 h, commenceront la veillée avec leurs hommes, après un apéritif . A 19h. le Colonel annonce aux Cdts de Cie, que trois d’entre eux partiront avec leur compagnie, au printemps suivant, outre-mer, dont deux en Afrique Noire pour une durée d’environ quatre mois. Et c’est le colonel Aussaresses qui, au cours d’une inspection fin juin, nous apportera sous l’équateur, les bobines des activités cinématographiques des « événements du printemps 68 » en métropole.

A cette première réaction, s’ajoute peu à peu une sourde colère d’entendre encore une fois ce que l’on présente comme un « devoir de repentance. »
Pendant la seconde guerre mondiale, l’Administration de la France métropolitaine essaya de sauver les meubles sous l’occupation allemande, tandis qu’un autre courant, félon au gouvernement de l’époque, à l’extérieur, pouvait parler haut et fort et bénéficier peu à peu de la volonté anglo-saxonne de détruire le III° Reich. Malheur aux familles françaises qui n’ont pas su hurler avec les loups, lors de « l’ épuration ». Et surtout, malheur à tous ceux qui peuvent servir de boucs émissaires à une intelligentsia parisienne, qui cherche à se donner bonne conscience, 40 ans plus tard, en jetant l’opprobre sur les serviteurs de l’Etat des années noires.
Avec la guerre d’Algérie, c’est l’inverse qui se passe : l’Armée récupère une situation de guerre civile déclenchée par une rébellion indigène, qui n’accepte pas le discours de la politique coloniale de l’après-guerre. La mission confiée sera remplie : le terrorisme sera pratiquement éradiqué, malgré le soutien de certains français, félons à leurs gouvernements successifs. Mais la politique décidera de se séparer de cette colonie découpée hypocritement en « départements ». Et la mode de repentance aidant, 40 ans plus tard, il faudrait encore une fois que l’on ait honte d’être Français, honte de s’être battu « pour le succès des armes de la France, et l’exécution des lois de la République ». Inversement, les porteurs de valise de la rébellion d’alors ont pignon sur rue et, pour cette même intelligentsia, il faudrait rendre hommage aux déserteurs de l’époque.


Par ailleurs, j’ai la volonté de faire connaître à mes proches, à l’époque où la guerre d’Algérie n’est évoquée par les médias de presse, radio, télévision, qu’à travers le prisme déformant de la torture, ce que j’ai fait de mes vingt ans.

Enfin, le coup de pouce qui enclencha le plan de rédaction suivi, fut la concrétisation de fait de la forte empreinte laissée par la formation initiale à Saint-Maixent-l’Ecole, par le Groupement E.S.O.A.. En effet, le 11 septembre 2001, quarante ans après, nous nous retrouvions à plus de cinquante pour jeter les bases de notre association : Le Passant Bleu, 30° Promotion E.S.O.A. Au cours de cette réunion, fut évoqué le besoin de parler de cette époque, que nous avons vécue les armes à la main.

Je suis fier d’avoir servi en Algérie. Je suis fier d’y avoir connu des hommes qui ont eu le courage de leurs opinions et d’assumer les responsabilités confiées à leurs chefs par les élus de la république, dans le cadre des ordres reçus des différents gouvernements. Les motivations réelles du dernier d’entre eux n’ont pas été perçues assez tôt par ceux qui, ayant cru au slogan « Une seule France de Dunkerque à Tamanrasset », s’étaient personnellement impliqués dans les réalisations concrètes sur le terrain. Certains d’entre eux n’ont pas su faire taire leur dégoût pour un chef qui les a sacrifiés « au nom de l’intérêt supérieur de la France », dans le sens de l’Histoire. Ils ont cru le Général, le Président leur a menti.

Pendant ces quinze mois au cours desquels se sont déroulées les péripéties décrites dans ces quelques pages, j’ai eu la « baraka » : celle d’avoir pu conserver mon intégrité physique et morale.

A Monptellier, le 12 Avril 2002.
Signé : François Lamour & limafoxromeo pour cette mise en page sur Internet.

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