MUTATIONS
En 1 mois, 3 Mutations.
En mer sur le "Sidi Okba"  

Traversée Maritime.
Vers 16 heures, je me présente à la gare d’embarquement maritime, au bureau militaire français : je voyagerai sur le « Sidi Okba », un ancien sister-ship américain transformé en cargo mixte... Ce n’est pas du tout le « Ville de Tunis » et j’ai été bien inspiré en me présentant tôt à l’embarquement. Les formalités de douane sont menées par les nouveaux douaniers algériens qui, très chatouilleux de leur nouvelle autorité, se révèlent redoutables : ils fouillent la cantine de fond en comble, mais dédaignent le sac à dos... Et j’en suis bien aise : à l'intérieuri, un étui de jumelles... mais celles-ci ont été perdues depuis longtemps et l’étui étant disponible, j’y ai placé quelques objets de petites tailles. Ces « souvenirs » découverts par les douaniers m’auraient attiré beaucoup d’ennuis...
Une fois à bord, j’accède rapidement à ma cabine et remercie mon porteur de cantine. La cabine est vaste, avec un hublot sur une paroi. Celle-ci est en fait la face intérieure de la coque métallique du navire ; elle est incurvée, à la fois vers l’avant et vers le bas et une sorte de creux formant une rigole passe sous les 2 parois adjacentes, dont celle de la porte qui permet d’accéder directement à l’entrepont. Plaquées sur les deux autres, quatre couchettes superposées et en équerre. Je choisis de suite la supérieure qui se trouve près de la porte, à l’opposé du hublot, et cela sera le bon choix. Peu à peu, d’autres passagers, tous sous-officiers, viennent occuper les autres couchettes, et la cabine fait le plein...eh bien non : deux marins arrivent avec deux matelas qu’ils placent au centre de la cabine, suivis de nouveaux sous-officiers. Cette fois, nous sommes au complet, et les cantines sont dans les coins.
Le haut-parleur du bord annonce que le repas sera servi à 19h.00 dans les salles à manger respectives, et nous nous y rendons. La salle est effectivement pleine quand les sirènes et le bruit de la machine nous font comprendre que nous quittons le quai. Il n’y a guère de conversation pour l’instant, mais en moins d’une minute, un sujet est trouvé : l’état de la mer : car ça bouge ! Quelle traversée en perspective !
Avant la fin du repas, nous ne sommes plus que sept convives, répartis dans toute la salle : le mal de mer a commencé à sévir, ramenant les passagers à leur couchette. Roulis et tangage montrent la capacité du « Sidi Okba » à escalader la houle méditerranéenne de cette tempête de décembre. Car il s’agit bien d’une tempête : le capitaine a décidé d’appuyer sa route vers le Nord-Ouest,
En cabine, la nuit est agitée , les victimes du mal de mer cherchant à atteindre les blocs sanitaires...
La rigole qui court le long de la coque nous permet de mieux apprécier les mouvements du rafiot ! des litres d’eau ne cessent d’y entrer ou d’en sortir, d’une paroi ou de l’autre, mais avec le tangage, la masse liquide quitte la rigole pour inonder toute la cabine : ça baigne ! Vers 7h.00 je quitte la cabine pour un brin de toilette, et bien que n’ayant pas le mal de mer, mon estomac ne résiste pas au spectacle qui y règne ; ce fut une toilette de chat.
Au petit déjeuner, nous ne sommes qu’une petite dizaine. Cette fois l’on parle... de la tempête : il paraît qu’un hublot mal fermé s’est ouvert et que la flotte a envahi une cabine...
Dans l’entrepont, le spectacle est triste : quelques passagers sont dans leurs transats, volontairement coincés entre des bagages qui ont été arrimés, et se sont recouverts d’une couverture qui les soustrait aux regards. Il est possible de grimper en haut de l’échelle, mais interdit de se rendre sur le pont : des marins tentent d’arrimer un « cadre » (container non normalisé) qui a cassé une de ses attaches...
Il n’y a plus de service à table en salle à manger : au repas de midi, pour les rares passagers qui se présentent, ne sont proposés que des sandwiches et des boissons...
Le vent ne souffle plus en tempête et la pluie a cessé ; il est même possible de se rendre sur le pont, et d’admirer au loin la côte...espagnole. Pour éviter le cœur de la tempête, le capitaine du navire a volontairement fait un grand crochet en passant au large d’Oran avant de traverser vers Valence et de remonter vers la France. Mais à cette heure, j’aurais pu être du côté de Valence, dans la Drôme bien sûr !
L’accostage à Marseille se fera vers 04 heures, par une nuit glaciale. J’ai laissé la cantine en cabine et me hâte de trouver un porteur. Après l’avoir aidé à grimper les différentes échelles, c’est par taxi que je gagne la gare Saint-Charles. Par voie aérienne ou maritime, je n’aurai jamais abordé de jour les Bouches du Rhône !

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